Test Achats a fait analyser les mèches de cheveux d’une centaine de petits Belges âgés de 3 à 15 ans pour traquer la présence de quelque 1 800 polluants organiques. Résultat ? Tous les enfants sont contaminés sans exception, et dans presque tous les cas, par plus d’un polluant (pesticides, médicaments, etc.). Un enfant sur deux est contaminé par au moins un des 23 polluants interdits et pourtant détectés par l’organisation de consommateurs. Certains de ces polluants sont interdits depuis plus de 20 ans ! Test Achats exige davantage de contrôles.
Biomonitoring
En juin 2021, Test Achats a fait prélever une petite mèche de cheveux de 3 cm (à la racine) auprès de 101 enfants âgés de 3 à 15 ans. Le biomonitoring de ces échantillons permet de révéler l’exposition chronique à la pollution au cours des trois derniers mois sachant que nos cheveux poussent en moyenne d’1 cm par mois. Concrètement, un laboratoire spécialisé a procédé à la recherche de 1 800 polluants organiques différents.
Jusqu’à 12 polluants par enfant
Quelque 261 polluants ont été découverts et parfois des polluants très différents au sein d’une même fratrie. Seuls trois enfants, parmi les 101 testés, n’étaient contaminés que par un seul polluant. Le laboratoire a détecté une moyenne de 5,5 polluants par enfant, mais certains en comptaient bien davantage. Ainsi, près d’un tiers (31%) des enfants testés font montre d’une toxicité chronique élevée puisque leurs cheveux contiennent plus de 7 polluants différents et pour certains jusqu’à 12 ! Bien qu’impressionnant, ce chiffre n’atteint heureusement pas le seuil d’alerte fixé par les experts du labo à partir de 20 polluants.
Certains polluants interdits depuis très longtemps
Parmi les polluants découverts, pas moins de 23 substances s’avèrent interdites en Europe. Et ce, parfois depuis de nombreuses années. Ainsi le « DNOC », un pesticide interdit depuis… 1999 ! Ou l’Atrazine, interdit depuis 2012, dépisté chez un des enfants, un autre herbicide persistant dont les résidus peuvent se retrouver des années encore après leur interdiction. Test Achats a également trouvé un produit de la famille des carbamates, le Carbofuran-3-OH-7-phenol, métabolite d’un pesticide (Carbofuran) utilisé contre les insectes dans les cultures de pommes de terre, de blé, de riz et de soja. Neurotoxique, il est suspecté d’être un perturbateur endocrinien et interdit en Europe.
Les pesticides occupent plus de 60 % du panel de polluants découverts chez les enfants. Ceci inclut des herbicides, insecticides, des fongicides (contre les champignons et moisissures), des rodenticides (contre les rongeurs), des molluscicides (anti-limaces), … Est-ce une surprise lorsque l’on sait que la Belgique fait partie du trio de tête des pays européens qui utilisent le plus de pesticides dans leur agriculture ?
Les médicaments (antibiotiques, vermifuges), tant à usage vétérinaire qu’humain, arrivent en deuxième position (10 %). Ils sont talonnés (9,2 %) par les intermédiaires chimiques de synthèse à l’instar des retardateurs de flamme et plastifiants utilisés notamment dans l’industrie textile et les produits ménagers (le Tri-iso-butyl phosphate a par exemple été détecté chez 13 enfants).
Quels risques pour la santé ?
Toutes ces substances ne sont pas forcément toxiques. La toxicité est un concept relatif, dépendant notamment de la quantité à laquelle l’organisme est exposé. Et chaque personne y réagit différemment en fonction de sa sensibilité à la substance et des périodes de la vie (les enfants et les femmes enceintes sont par exemple plus vulnérables). Certains polluants détectés sont toutefois avérés, et d’autres suspectés, d’être cancérigènes, mutagènes (dommages génétiques), tératogènes (effet sur le fœtus), reprotoxiques (problèmes de fertilité), neurotoxiques (dangers pour le système nerveux) et, pour beaucoup, perturbateurs endocriniens (effets hormonaux). L’un des risques majeurs de cette pollution réside dans « l’effet cocktail » : un processus qui fait qu’en s’associant, des molécules, même a priori inoffensives, peuvent par synergie s’avérer délétères pour notre organisme.
Plus de contrôles, svp !
“Nous sommes interloqués d’avoir détecté 23 polluants interdits en Europe, parfois depuis de très nombreuses années” réagit Julie Frère, porte-parole de Test Achats. “Ce constat nous amène à demander à nos autorités d’augmenter la fréquence des contrôles des produits à destination du marché belge. Nous demandons également que des études sérieuses soient menées quant à l’impact sur la santé de l’effet cocktail de diverses substances dans nos organismes. Notre analyse montre que l’on ne peut plus se limiter à étudier l’impact individuel de chaque polluant sur l’organisme” conclut-elle.